C’est l’heure du goûter à la crèche. Tous les bambins s’alignent pour avoir leur petit pain et leur barre de chocolat. Seule Dorothée reste à l’écart.
- Tu ne veux pas goûter, Dorothée ? demande la puéricultrice.
- Nan !
- Comment ! Tu ne veux pas un bon petit pain au lait avec une barre de chocolat ?
- Nan ! Va t’faire foutre !
Choquée, la puéricultrice appelle la directrice qui entre dans la salle et s’approche de Dorothée.
- Eh bien, ma chérie, dit la brave femme. Il paraît que tu ne veux pas goûter ?
- Nan ! Va t’faire foutre avec ton p’тiт pain et ton chocolat.
Outrée, la directrice convoque la maman de Dorothée dès le lendemain et l’invite à se cacher derrière une tenture pour observer le comportement saugrenu de son enfant. Arrive l’heure du goûter et, à nouveau, la gamine refuse de s’aligner avec ses petits camarades. La directrice réitère sa question de la veille et Dorothée répond :
- Va t’faire foutre avec ton p’тiт pain et ton chocolat !
Un moment plus таrd, la directrice va rejoindre la maman derrière la tenture.
- Voilà, madame, dit-elle, vous avez tout entendu. C’est tout de même très déroutant de la part d’une petite fille de cet âge. Que dois-je faire à votre avis ?
- Ne lui donnez pas de goûter. Tant pis pour elle, qu’elle aille se faire foutre !
À la suite d’un terrible orage, le muret qui sépare le paradis de l’enfer s’est fissuré. Dieu et le diавlе vont constater les dégâts.
- Bon, eh bien, il faut faire réparer tout ça, dit Dieu. Si tu veux, je viens d’apercevoir un très bon maçon, il nous fera ça très bien.
- D’accord, dit le diавlе.
- Parfait. Je t’enverrai son devis, on se partagera la note moitié-moitié.
- Pas question, dit le diавlе.
- Comment ça, « pas question » ?
- Je ne paierai rien du tout.
- Mais c’est un scandale ! dit Dieu. Tu es vraiment impossible ! Si tu refuses de payer, je te préviens que je ne me laisserai pas faire !
- Vraiment ? dit le diавlе en rigolant. Et qu’est-ce que tu feras ?
- Je prendrai un avocat !
Là, le diавlе hurle de rire…
- Et à ton avis, où tu vas le trouver ?
Un matin, les élèves d’une classe de terminale ont la surprise de se retrouver seuls. Pour une fois, c’est le prof qui est malade.
- Aucun surveillant n’est libre pour diriger votre étude, dit le directeur de l’établissement. Mais vous êtes assez grands pour vous garder vous-mêmes. Restez tranquilles et ne dérangez pas les autres classes, c’est tout ce que je vous demande !
Dix minutes plus таrd, bien évidemment, il règne dans la salle un chahut indescriptible. Fou de rage, le directeur ouvre la porte à la volée, fonce dans la classe et saisit par le bras trois chahuteurs au hasard.
- Toi ! dit-il au premier. Que faisais-tu debout ?
- J’écrivais des poèmes au tableau, répond l’adolescent.
Le directeur y jette un coup d’œil, et ce qu’il y lit parvient à le faire rougir.
- Tu n’as pas honte d’écrire des cochonneries pareilles ? Renvoyé trois jours ! Au suivant : toi, que faisais-tu debout ?
- J’étais allé fumer une cigarette, répond le deuxième potache.
- Fais voir ?
Avec horreur, le directeur découvre qu’en fait de cigarette, c’est un joint de marijuana que l’élève dissimule au creux de sa main.
- Quel scandale ! Renvoyé dix jours ! Et toi, le dernier, que faisais-tu debout ?
- Je jetais du papier par la fenêtre, m’sieu.
- C’est tout ? Bah, ce n’est pas bien grave… Une heure de colle pour toi, ça suffira…
À cet instant, la porte s’ouvre et un élève hirsute, couvert d’ecchymoses, saignant du nez et boitant bas entre dans la classe.
- Qu’est-ce que c’est que cette tenue ! s’exclame le directeur. Comment t’appelles-tu, toi ?
- Dupapier, m’sieu.
Jack Lang arrive au paradis, en même temps que Maurice Béjart et Marguerite Duras. A l’entrée, sаinт Pierre contrôle sévèrement les identités de chacun des postulants.
- Je suis Marguerite Duras, dit la première.
- Moi, je veux bien vous croire, répond sаinт Pierre, mais il va falloir me le prouver.
Alors Marguerite Duras lui récite de mémoire quelques pages de son dernier livre et sаinт Pierre, convaincu, la laisse passer.
- Je suis Maurice Béjart, dit le second.
- Moi, je veux bien vous croire, mais il va falloir le prouver.
Alors Maurice Béjart hèle quelques anges et, en quelques heures, monte une divine chorégraphie du Sacre du printemps. Sаinт Pierre, convaincu, le laisse passer.
- Je suis Jack Lang, dit le troisième. Le ministre de la Culture…
- Écoutez, répond sаinт Pierre. Moi, je veux bien vous croire, mais tout le monde pourrait en dire autant. Tout à l’heure, par exemple, j’ai été obligé de demander à Maurice Béjart et à Marguerite Duras de me prouver leur identité…
- Béjart et Duras ? fait Jack Lang. Connais pas…
- C’est bon, vous pouvez entrer, dit alors sаinт Pierre avec un soupir. Vous êtes bien le ministre de la Culture.